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Ce qu'il se passe en Serbie 
Ardentes Patiences, 5 juillet 2025

1er novembre 2024 : L’effondrement de l’auvent de la gare de Novi Sad 

L’auvent en béton, de 48 mètres de long, est au-dessus de l’entrée principale de la gare. En dessous se trouvent des bancs et il s’agit d’un lieu très fréquenté. La chute de cette structure, sur une gare qui venait pourtant d’être rénovée, entraîne la mort de quinze personnes, dont un enfant de six ans. Trois jeunes sont très grièvement blessés.

L’effondrement de l’auvent donne lieu à des manifestations de masse, principalement d’étudiants, contre la corruption, d’abord à Novi Sad puis s’étendant à Belgrade et à d’autres villes de Serbie.

En 2021 avait été annoncé un plan de rénovation et d’extension de la gare pour revitaliser et moderniser l’infrastructure ferroviaire de la Serbie, avec l’introduction de trains rapides. La rénovation comprenait la mise à niveau des voies, la construction d’une nouvelle plateforme et la rénovation complète du bâtiment principal, avec des ascenseurs supplémentaires pour les personnes à mobilité réduite. 65 millions d’euros avaient été investis dans les travaux sur la gare dont 16 millions pour le bâtiment principal. Les travaux commencèrent en septembre 2022. La rénovation de la gare est réalisée par des entreprises chinoises — China Railway International et China Communications Construction Company (CCCC). Le bâtiment rénové de la gare ouvre ses portes le 19 mars 2022. Le contrat signé pour ces travaux n’a jamais été rendu public dans son entièreté, le ministère des Transports, de la Construction et des Infrastructures de Serbie refusant sa publication. 

Les représentants du gouvernement soutenaient même qu’il n’y a pas eu de travaux de reconstruction sur l’auvent de la gare, ce qui a été publiquement dénoncé comme un mensonge. L’ingénieur civil Danijel Dašić déclare que l’auvent s’est effondré à cause de structures en verre et en cuivre supplémentaires qui ont été ajoutées lors de la rénovation. L’ingénieur Zoran Djaić, qui faisait partie de l’équipe de reconstruction, rend public le fait qu’il y a eu des travaux sur l’auvent, et qu’il a lui-même demandé que les structures en verre et en cuivre soient enlevées afin de vérifier l’état du support. Même sur les réseaux sociaux sont publiées des vidéos dans lesquelles on voit les ouvriers effectuer des travaux sur l’auvent. 

 

 

 

 

 

 

3 novembre : Une manifestation à Belgrade devant le ministère des Transports, de la Construction et des Infrastructures 

À ce moment-là, à Novi Sad durent encore les trois jours de deuil national. Les manifestants à Belgrade (citoyens et opposition) ont les mains peintes en rouge pour dire « vous avez du sang sur les mains ». Ils s’adressent aux policiers qui ne les laissent pas s’approcher du bâtiment du ministère en criant : « Vous protégez les tueurs ! ». Sur les pancartes on lit « Un crime, et non pas une tragédie » et « Si vous cherchez des réponses, regardez-vous dans le miroir ». On demande l’arrestation des responsables et la démission du ministre. Le ministre des Transports, de la Construction et des Infrastructures annonce sa démission le lendemain, le 4 novembre. Le 3 novembre les manifestants laissent des traces rouges également sur le bâtiment de la Cour d’appel. 

5 novembre : Une manifestation devant la gare à Novi Sad

Dans cette manifestation il y a plusieurs milliers de personnes. Elle est l’une des plus grandes ayant eu lieu à Novi Sad. Néanmoins, un groupe de personnes masquées provoque des incidents à la fin de la manifestation. On soupçonne qu’ils ont été organisés par le parti au pouvoir. La police intervient, mais selon les personnes présentes, celle-ci n’arrêtait pas forcément les gens masqués, mais plus souvent les manifestants calmes et les personnes connues de l’opposition. 

 

22 novembre : Début de l’occupation des Universités en Serbie par les étudiants, à commencer par la Faculté des Arts du Spectacle 

Ce blocus commence à la faculté des arts du spectacle à Belgrade. Le 22 novembre, un groupe organisé (en lien avec le parti politique au pouvoir) attaque des étudiants et des professeurs qui manifestent et bloquent un boulevard près de l’établissement. Les étudiants de cette faculté décident alors d’un blocus de leur université dès le 25 novembre et invitent à un blocus général de toutes les Universités.

 

15 décembre : Refus de négocier

Après environ un mois de fermeture des universités, dans une émission à la télévision, les étudiants expliquent que le président Vučić leur a proposé une discussion :

 

« Cette invitation ne nous a pas intéressés. Nos demandes ne s’adressent pas au président mais aux institutions qui sont censées s’occuper des affaires en question. Nous ne changerons pas d’avis tant qu’on ne répondra positivement à nos demandes. Ce n’est pas du domaine du président de la république. »

 

À ce moment-là, une petite partie des documents liés au travaux de reconstruction de la Gare à Novi Sad est publiée, mais pas l’essentiel. 

 

22 décembre : Une des premières grandes manifestations étudiantes à Belgrade

Cette manifestation est considérée, par son ampleur, comme étant la plus grande de toute l’histoire de la Serbie – environ 100 000 personnes selon les estimations. Des citoyens de tout âge rejoignent les étudiants. Les acteurs de théâtre et de cinéma, ainsi que les agriculteurs, sont nombreux. Les agriculteurs manifestaient déjà contre l’exploitation de lithium par des entreprises étrangères, au risque de catastrophes écologiques dans plusieurs régions du pays. Ils rejoignent très vite le mouvement étudiant. C’est aussi le cas de retraités, qui portent une pancarte disant : « Les retraités avec la jeunesse pour le droit et la justice. La corruption tue. » De même, tous les acteurs de l’éducation nationale rejoignent très vite le mouvement. Ils manifestent quant à eux contre la mise en valeur de la violence dans la société (dans les médias, entre autres) depuis la tragédie survenue dans une école à Belgrade, où un élève a tué plusieurs camarades de classe avec une arme à feu.  

Les manifestants font 15 minutes de silence pour les 15 victimes de la Gare de Novi Sad. Beaucoup de participants expriment un étonnement vis-à-vis du fait qu’une masse de gens aussi énorme puisse garder un silence total à ce moment-là.

Les étudiants demandent :

Les manifestants font 15 minutes de silence pour les 15 victimes de la Gare de Novi Sad. Beaucoup de participants expriment un étonnement vis-à-vis du fait qu’une masse de gens aussi énorme puisse garder un silence total à ce moment-là.

Les étudiants demandent :

  1. la publication de tous les documents liés aux travaux de la gare de Novi Sad, ce qui n’a pas été fait pour le moment ;

  2. l’abandon des accusations vis-à-vis des manifestants, dont certains ont été placés en garde à vue ;

  3. le jugement pour les personnes qui ont attaqué les manifestants et qui sont pour certaines connues publiquement ;

  4. l’augmentation du budget pour les universités publiques de 20%.  

   

28 décembre : Les avocats soutiennent les étudiants

Les avocats de Vojvodina (région au nord de la Serbie dont Novi Sad est la capitale), puis de toute la Serbie, ont pris ce jour la décision de former une liste pour le soutien gratuit aux étudiants, mais également à d’autres citoyens qui se sont retrouvés en garde à vue ou emprisonnés à la suite des manifestations pacifiques. En effet, le mot d’ordre se propage parmi les étudiants et les citoyens que s’ils sont convoqués par la police, il faut s’y rendre sans son téléphone portable, car celui-ci peut être confisqué et des contacts des autres collègues ainsi récupérés. Et qu’il faut par ailleurs s’y rendre en compagnie d’avocats volontaires. Les étudiants se mettent progressivement à appliquer ces mesures, ce qui contribue à protéger le mouvement.

Les avocats proposent par ailleurs de faire grève pendant une semaine en signe de soutien au mouvement étudiant et à leurs demandes. Ils arrêtent en effet de travailler pendant une semaine à compter du 18 janvier, puis pendant un mois à compter du 2 février. Ils ne tiennent pas non plus le pot traditionnel de fin d’année étant donné le décès de 15 personnes à Novi Sad, et la blessure de deux autres. L’argent prévu pour cette fête annuelle a été versé aux étudiants occupant la faculté de droit, pour l’achat de nourriture et d’autres matériels nécessaire au mouvement. 

 

Décembre : Des étudiants en psychologie organisent un groupe de soutien pour leur collègues

Les psychologues et étudiants en psychologie commencent à organiser des groupes de discussion pour soutenir leurs collègues pendant le blocus, concernant la pression à laquelle ils pouvaient être confrontés durant le blocus des universités mais également en lien avec les convocations ou arrestations par la police.

 

À partir du 30 décembre : Manifestations de soutien dans les pays de l’ex-Yougoslavie

À travers le monde, la diaspora serbe organise depuis un mois des manifestations de soutien aux étudiants. Mais c’est aussi le cas dans tous les pays de l’ex-Yougoslavie, où la population locale organise des manifestations de soutien. Quelques exemples, entre autres : 

27 décembre : à Sarajevo et Banjaluka en Bosnie.

30 décembre : à Skopje en Macédoine du Nord, les étudiants manifestent devant l’ambassade de Serbie pour soutenir leurs collègues serbes, avec le message que les problèmes sont les mêmes dans tous les pays de la région — la corruption et les institutions endommagées — et qu’ils sont solidaires avec le mouvement étudiant, qu’ils saluent. D’autres manifestations ont lieu en Macédoine.

25 janvier : une manifestation en Slovénie suit les mots d’ordre « le soutien ne connaît pas les frontières » et « les étudiants sont avec les étudiants ». Une autre manifestation a lieu dans le même pays le 2 février.

1er février : dans trois villes en Croatie, à Zagreb, Split et Osijek. Les rassemblements commencent à 11h52 (l’heure de l’effondrement de l’auvent de la gare à Novi Sad). Après 15 minutes de silence, les manifestants applaudissent longuement les étudiants de Serbie. Leurs pancartes affichent : « Pour tous nos enfants », « Soutien aux étudiants de Serbie », « Split est avec la jeunesse ». 

À partir du 04 janvier 2025 : Manifestations de la diaspora serbe dans le monde entier 

À Vienne, la diaspora Serbe organise la première manifestation de soutien au mouvement étudiant devant l’ambassade de Serbie. Ensuite, le 11 janvier à Paris et encore une fois à Vienne, les manifestations de la diaspora avec les slogans « la corruption tue » et « partez pour que nous puissions revenir ». Le 18 janvier encore une fois à Paris et à Amsterdam : « La diaspora avec la jeunesse » et « quand je serai grand je serai étudiant ». 

Une grande manifestation a lieu à New York le 19 janvier. Puis à Milan : « la corruption tue », « Le monde entier vous regarde », « À cause de vous loin de chez nous ». D’autres villes en Italie également, ainsi qu’à Londres, Barcelone, Madrid, Bruxelles, en Norvège, à Malte, au Canada, en Nouvelle Zélande et dans de nombreuses villes en Allemagne, etc. À Bratislava : 

" LEUR CORRUPTION / NOTRE ÉMIGRATION "

 

 

 

 

27-28 janvier : Blocus de « Autokomanda » par les étudiants pendant 24h, à Belgrade

Les étudiants organisent un blocus de « Autokomanda » (un quartier de Belgrade où passent les routes importantes), qui dure 24 heures, du lundi 27 janvier à 10h et jusqu’au lendemain à 10h. Ils se rassemblent devant leurs Universités respectives et chaque groupe se dirige vers « Autokomanda ». Les règles à respecter sont publiées à l’avance pour assurer la sécurité de tout le monde. Ils laissent le passage libre pour les ambulances. Personne n’est descendu sur l’autoroute pour des raisons de sécurité. Mais ils affichent un mot en invitant les chauffeurs qui passent par l’autoroute à klaxonner en signe de soutien. Ils passent la nuit sans aucun incident et nettoient les lieux avant de partir. 

 

28 janvier : Le premier ministre Miloš Vučević annonce sa démission

 

30 janvier-1er février : La marche des étudiants de Belgrade jusqu’à Novi Sad (80km à pied) et la fermeture des ponts à Novi Sad

À ce moment-là, les universités du pays ont cessé le travail depuis deux mois. Le président Vučić invite les étudiants « pour négocier », ce qui est refusé car les étudiants ne souhaitent pas choisir des représentants pour leur mouvement et, comme ils l’ont annoncé publiquement, ils ne se sont jamais adressés au président. Ils réitèrent leur demande que les institutions fassent leur travail. Ce commentaire est salué et raconté avec enthousiasme dans la population.

Les étudiants décident de marcher de Belgrade à Novi Sad où ils arrivent le 1er février pour rejoindre leurs collègues sur place. Ils bloquent à 15h les ponts de Novi Sad. La population les rejoint. Ils insistent sur le fait que la manifestation doit se dérouler sans incidents.

À ce stade, la population se montre extrêmement solidaire avec les étudiants. Leurs professeurs, les acteurs, et autres s’expriment publiquement avec des mots d’encouragement, de remerciement, et de fierté pour la jeunesse. 

 

31 janvier-1er février : les chauffeurs de taxi de Belgrade soutiennent les étudiants

Pour exprimer leur soutien au mouvement étudiant, les chauffeurs de taxi de Belgrade font un aller-retour pour les ramener gratuitement à Belgrade après la grande manifestation à Novi Sad. Ils publient un mot sur les réseaux sociaux :

 

« Nos chers étudiants, nous venons vous chercher dimanche vers 15 heures. Des dizaines de mes collègues ont déjà répondu à cet appel à se rassembler à Novi Sad et retourner ensemble à Belgrade. Respectueusement, les chauffeurs de taxi de Belgrade. »

 

Rapidement, environ cent chauffeurs de différentes villes les rejoignent.

 

1er février : Grève des travailleurs dans les transports publics à Belgrade

Ils soutiennent les étudiants et manifestent également contre la disparition des trolleybus et les contrats avec les transports privés, et souhaitent une garantie que certains de leurs locaux ne soient pas mis à disposition de particuliers.

 

3 février : « Culture dans le blocus »

L’organisation nouvellement créée « Culture dans le blocus », par tous les travailleurs du monde culturel (arts du spectacle, danse, musées…) bloque le ministère de la culture. Ils font 15 minutes de silence, soutiennent toutes les demandes des étudiants, et manifestent par ailleurs contre le budget honteusement bas accordé à la culture : 0.67% du budget public. 

 

13 février : Les étudiants prennent le centre culturel étudiant à Belgrade

Cette institution, jadis lieu culturel de la jeunesse et qui a aujourd’hui perdu cette fonction, est reprise par les étudiants. 

 

15 février : Rassemblement « Sretnimo se na Sretenje » à Kragujevac

Le 15 février est le jour de la fête nationale. Les étudiants arrivent ce jour-là à Kragujevac en plusieurs colonnes : à vélo, en courant et en marchant depuis différentes villes du pays. Leurs collègues de Kragujevac les y reçoivent avec la population pour bloquer le jour même la rue principale du matin au soir, pendant 15 heures. Ils écrivent : « Bienvenue à tous ceux qui se sentent libres et libres d’esprit. » Ils invitent tous les citoyens, mais uniquement en leur nom propre, le rassemblement n’étant pas ouvert aux partis politiques. 

 

En héros du jour, les étudiants de Niš marchent environ 150km en plusieurs jours pour rejoindre ce rassemblement. Sur leur chemin, tous les étudiants sont chaleureusement accueillis dans toutes les villes et villages où ils passent. La population les assiste en les amenant chez le médecin pour leurs blessures aux pieds, leur apporte à manger et à boire, de quoi s’habiller. On les remercie dans la joie et les larmes. 

Le rassemblement est particulièrement bien organisé, avec un programme publié à l’avance, ainsi que les précautions de sécurité : un passage est laissé pour les ambulances si besoin. Les manifestants sont invités à se tenir loin des ponts. Il faut signaler aux organisateurs toute personne cherchant à provoquer des incidents ou portant une arme. Une équipe de nettoyage assure le fait de laisser la ville propre dans la soirée. Même la police locale doit admettre qu’en effet aucun incident n’a eu lieu.

 

Pendant le blocus les étudiants organisent différentes actions humanitaires, comme la récolte d’argent pour les enfants gravement malades. Ils organisent aussi des ateliers pour les enfants. Mais également un tournoi d’échecs, une chorale, de la musique (piano), des spectacles, du théâtre. La lecture des écrits des étudiants. Par ailleurs, 15 minutes de silence ont marqué le début comme la fin du rassemblement.

 

En Serbie, le 15 février est le jour du commencement du premier soulèvement contre l’empire Ottoman en 1804. Mais c’est également le jour de la première constitution de ce pays en 1835, qui a vu le jour grâce au fait que la population ait manifesté contre le pouvoir trop absolutiste de Milos Obrenovic, sous lequel les gens ne vivaient finalement pas beaucoup mieux que sous l’empire Ottoman. La nouvelle constitution devait limiter son pouvoir et elle s’inspirait, entre autres, des droits de l’homme et du citoyen issus de la Révolution française. La constitution n’a pu durer que 55 jours, pour être remplacée par ce qu’on a appelé « une constitution Turque ». 

 

Les chauffeurs de taxi : Comme cela a pu se faire auparavant, les chauffeurs de taxi de différentes villes participent à ramener les étudiants à la maison après le rassemblement à Kragujevac. Il y a environ 300 voitures de Belgrade et au total environ 400. Les vidéos de colonnes interminables de voitures de taxi se dirigeant vers la ville de Kragujevac sont publiées en ligne.

 

La fête nationale, version de l’État : À l’occasion de la fête nationale, le président Vučić organise également un rassemblement, dans la ville de Sremska Mitrovica. Les habitants de la ville manifestent contre cette visite avec les paroles « Où tu vas, tu n’es pas le bienvenu ». Finalement, ce rassemblement qui avait probablement pour but de les provoquer se tient sans incidents. Néanmoins, les gens publient ensuite beaucoup de commentaires sur les réseaux sociaux et ailleurs, dont certains humoristiques. Un jeune homme de Sremska Mitrovica qui manifeste ce jour-là à Kragujevac porte une pancarte où est écrit « Dégage de mon jardin. Sremska Mitrovica »

Le président Vučić qui prépare des sandwichs pour ses manifestants devant la caméra dit pour la presse que dans ce rassemblement on mange pauvrement car on n’a pas de financements étrangers (ce dont il accuse le mouvement étudiant). Ceci en faisant allusion au fait qu’à Kragujevac les citoyens donnent gratuitement beaucoup de nourriture non seulement pour les étudiants mais pour toutes les personnes présentes.

Les photographies suivantes voient aussitôt le jour sur les réseaux sociaux :

 

 

 

16 février : Manifestations dans tout le pays

Les journaux affirment mi-février que des manifestations de soutien au mouvement étudiant ont eu lieu une ou plusieurs fois dans au moins 302 villes et villages en Serbie depuis novembre 2024.  Dans beaucoup d’endroits, les manifestations de soutien ont maintenant lieu chaque semaine, voire deux fois par semaine, par exemple chaque vendredi et chaque samedi. 

 

27 février : La nouvelle directrice du cinquième lycée à Belgrade se voit obligée de quitter l’établissement.

Cette directrice nouvellement nommée pour des raisons purement politiques, n’ayant pas la formation nécessaire pour occuper ce poste et arrivée avec le but d’obliger les enseignants en grève à reprendre le travail, se voit obligée de quitter l’école. Dès son arrivée les professeurs quittent la salle de réunion et avec élèves et parents manifestent devant le lycée. La directrice est escortée par des policiers en civil et l’établissement est fermé jusqu’à nouvel ordre. Les élèves d’autres lycées rejoignent rapidement et soutiennent les manifestants. 

Février : Création d’un journal des étudiants 

Les étudiants de l’université des arts du spectacle ont décidé de créer un journal hebdomadaire pour transmettre les informations sur les événements depuis le début du blocus. Il est accessible sur la chaine YouTube « SVI U BLOKADE | FDU ». Ils ont intitulé leur émission : «  Serbie, ressens quelque chose, n’importe quoi, littéralement n’importe quoi.  »

 

Le premier épisode de ce journal critique surtout la télévision nationale et les fausses informations qui y sont propagées. La vidéo commence par un montage où l’on voit le bâtiment de la télévision nationale lancé dans l’espace. Explication à la fin : 

 

« Depuis des années les gens disent que la RTS informe comme si elle n’était pas de cette planète. » 

 

« La radio et télévision de Serbie nous doivent les informations, la vérité, l’objectivité, l’impartialité, l’excuse, le temps. »

 

1er mars : Un grand rassemblement à Niš, l’édit étudiant

Les étudiants et la population de tout le pays se rassemblent dès 9h du matin dans plusieurs endroits à Niš. Le rassemblement dure jusqu’à 3h du matin. Semblable à celui qui a lieu à Kragujevac le jour de la fête nationale.  Les étudiants proclament ce jour un édit :

 

« Nous les étudiants, citoyens libres de Serbie, rassemblés dans la ville de NiS, la ville qui est témoin des nouvelles idées et des changements, ville qui à travers des siècles était au croisement de l’Histoire, et où la liberté trouvait toujours son chemin, nous proclamons cet édit, par lequel nous annonçons les valeurs pour lesquelles nous nous battons, comme un engagement envers l’avenir et l’État dans lequel nous voulons vivre. 

 

De la liberté

La Serbie est un pays de gens libres. La liberté n’est pas une miséricorde, mais un droit principal et inséparable de la dignité de chaque citoyen. La liberté est la base de notre société démocratique, de nos lois, de notre parole, et de notre pensée. 

 

De l’État

L’État est le bien commun de tous ses citoyens. Les institutions de Serbie doivent servir le peuple et être une base de confiance, et non pas l’instrument du pouvoir de quelques-uns. Nous œuvrons pour un État dans lequel la loi est l’autorité suprême et où la fonction politique veut dire servir les citoyens et non pas avoir un privilège. 

 

De la justice

La justice est la base d’une société stable. Une jurisprudence indépendante, les médias et les institutions indépendantes doivent agir selon la loi et non pas sous pression politique. L’égalité doit être une réalité pour chaque citoyen de Serbie. 

 

De la jeunesse

Les jeunes ont montré qu’ils ne sont pas uniquement les héritiers de la Serbie, mais également les défenseurs de sa constitution. Les étudiants, comme porteurs de cette bataille, protègent les valeurs sur lesquelles doit reposer notre société. La jeunesse de la Serbie demande un système fondé sur l’effort et la connaissance, le savoir. 

 

De la dignité

Nous œuvrons pour une société dans laquelle on respecte la dignité de chaque individu. La dignité suppose qu’une personne ne soit pas humiliée à cause de ses attitudes et opinions. Une Serbie dans laquelle les experts ne sont pas sous-estimés, et où la connaissance est valorisée plus que l’obéissance, où les jeunes voient l’espoir dans leur pays.   

 

Du savoir

Le savoir, ou la connaissance, est la base du progrès de chaque société. Nous demandons une Serbie qui investit dans la science, la recherche, l’éducation et la culture comme les priorités de son développement. Les universités doivent être des centres indépendants de l’excellence et non pas les plateformes d’achat des diplômes et de l’influence politique. 

 

De la solidarité

Les chemins de nos villes, de NiS à Novi Sad, de Belgrade à Kragujevac, témoignent de la puissance de l’unité du peuple. Cette solidarité, inconnue jusque-là des systèmes fondés sur les divisions et les discordes, devient notre engagement et notre force dont nous prendrons soin et que nous défendrons. Transformant les voix individuelles en une force de changement, nous avons prouvé que la Serbie n’est pas un assemblage d’intérêts divisés mais un ensemble de citoyens qui partagent une vision pour le futur. 

 

Du futur

Que cet édit soit notre obligation, notre promesse des uns aux autres, que nous construisions un État qui appartiendrait à tous, dans lequel chaque enfant pourra faire de grands rêves. Un État dans lequel la liberté et la justice

seraient plus fortes que n’importe quel individu, dans lequel le pouvoir ne se servirait pas du peuple, mais c’est elle qui servirait le peuple. »

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« CHAQUE SERBE ET SANS AUCUNE EXCEPTION EST ÉGAL DEVANT LA LOI SERBE.

KRAGUJEVAC 15.02.1835 »

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À gauche, Vučić préparant les sandwiches, à droite, un citoyen à Kragujevac proposant un riche buffet.

 

"ÉCONOMIE EN IMAGES. LES VÊTEMENTS DE LUXE POUR LE CUISINIER ET LA NOURRITURE BON MARCHÉ POUR LE PEUPLE. OU LES VÊTEMENTS BON MARCHÉ POUR LE CUISINIER ET LA NOURRITURE DE LUXE POUR LE PEUPLE."

En haut, Kragujevac où l’équipe de ménage des étudiants a tout nettoyé après le rassemblement pour la fête nationale et en bas, Sremska Mitrovica après le rassemblement organisé ce jour par le président.

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4 Mars : L’opposition interrompt une session du Parlement

L’opposition interrompt une session du Parlement avec des fusées éclairantes, des gaz lacrymogènes, ainsi que des œufs jetés sur les représentants du parti au pouvoir. On crie « Mali le voleur ! » au vice premier ministre. 

Un membre de l’assemblée dit aux journalistes que l’opposition a demandé que la session soit consacrée exclusivement aux demandes des étudiants, ce qu’on lui a refusé. Et que par ailleurs la majorité a voulu imposer le vote d’une soixantaine de lois ce jour-là pour tenter de les faire passer selon leurs intérêts. 

« La Serbie se lève pour que le régime tombe » est le mot d’ordre de l’opposition, pas du mouvement des étudiants.

Une étudiante de l’Université des Arts du spectacle (ou arts dramaturgiques) interviewée par les journalistes ce jour explique que les étudiants ont marqué 100 jours depuis le début du blocus des universités et que l’on n’a toujours pas répondu à aucune de leurs demandes. Interrogée par les journalistes sur ce qu’elle pense de pourquoi on n’a toujours pas répondu à leurs demandes, elle répond : 

 

« C’est parce que nous demandons que les institutions fassent leur travail. Il semble que nous avons touché à un point qui est lié à toutes les autres choses qui ne fonctionnent pas. De ce fait, nous attendons toujours. » 

 

Elle souligne que le mouvement étudiant n’a aucun lien avec un quelconque parti politique ou acteur politique et considère que la session du parlement ce jour ressemblait à un cirque. Elle pense que l’opposition aurait pu simplement quitter la session plutôt que de continuer avec des incivilités.

7 mars : Grève 

Les étudiants ont appelé à une grève générale pour la journée du 7 mars.

Ce jour-là, le 7 mars, une très grande manifestation a lieu devant le bâtiment de la télévision nationale RTS. Une partie des employés de cette télévision rejoint les manifestants. Ils demandent :

  • une responsabilité morale des journalistes et des éditeurs de programme. Une excuse publique au Journal 2 pour les insultes contre les journalistes, les étudiants et les acteurs. Ainsi qu’à tous les spectateurs ; 

  • une excuse à la journaliste Lidija Georgijev à cause de l’insulte qui lui a été adressée le 1er mars dans le Journal 2 ;

  • une excuse aux étudiants à cause des insultes et des calomnies les concernant dans les principales émissions d’informations. Mais aussi pour l’absence d’informations et la relativisation de leurs activités dans les trois derniers mois ; 

  • des excuses aux acteurs à cause des insultes qui leur ont été adressées dans le Journal 2 ; 

  • des excuses aux citoyens pour avoir été exposés aux informations fausses et censurées, indignes d’un service public ; 

  • de vraies informations, indépendamment de la pression. Ainsi que la fin de la corruption et des conflits d’intérêts ; 

  • un droit de travailler en propageant de vraies informations, de manière indépendante sans censure, de manière professionnelle, ce qui est dernièrement mis à mal ; 

  • la modification du programme de la télévision en accord avec les lois en vigueur et l’éthique des journalistes. Ce qui suppose de pouvoir informer sur tous les événements qui sont d’un intérêt public pour tous les citoyens. Et la possibilité d’accueillir dans leur programme toutes les parties/composantes de la société ; 

  • ils soulignent que à cause de la manière de travailler actuelle la majorité des employés se sentent pris en otage par une minorité irresponsable. Ils sont de ce fait confrontés à de nombreux problèmes dans leur travail et au fait que la réputation de la télévision nationale se dégrade de jour en jour ; 

  • ils réclament que l’on réponde à leurs demandes avant le 15 mars.  

  

S’ajoute à cela les professeurs qui n’ont pas été payés : les enseignants des lycées et puis également les professeurs des Universités qui étaient en grève. 

 

Février-mars : Les étudiants 2.0 

Un groupe s’est formé qui se nommait « étudiants 2.0 », demandant la fin du blocus et la reprise des cours et des examens. 

Il s’avère au fur et à mesure qu’il ne s’agit même pas réellement d’étudiants des Universités. Mais semble-t-il plutôt d’un groupe organisé par le gouvernement et qui servira pour manipuler l’opinion publique mais aussi pour tenter de semer le désordre dans les rassemblements et les manifestations. Leur campement dans un parc à Belgrade est régulièrement protégé par la police voire la gendarmerie lors des grandes manifestations.   

 

6 mars : Journal des étudiants épisode 3

La démission du premier ministre annoncée depuis janvier n’a toujours pas eu lieu, à l’épisode 3 du journal, on déclare :

 

« Qu’est-ce que ça veut dire si le gouvernement tombe ? - Ça ne veut rien dire. »

8 mars : Manifestation « Epaule contre épaule les étudiants et les ouvriers » 

Place de la République à Belgrade. Les étudiants de Subotica au nord du pays rejoignent le rassemblement à pied. Les travailleurs dans les transports publics ainsi que les travailleurs dans la distribution de l’électricité sont nombreux. Les étudiants et les ouvriers expriment une solidarité avec les agriculteurs, à qui la police refuse l’accès au centre-ville avec leurs tracteurs. Les autres manifestants viennent donc vers eux. 

15 mars, Belgrade : « Le 15 pour les 15 », le plus grand rassemblement populaire en Serbie mais aussi dans la région

Un grand rassemblement à Belgrade est annoncé depuis quelque temps par les étudiants, auquel ils ont invité les citoyens de tout le pays.

Pendant longtemps les médias, le président et son parti ont essayé de semer la peur avant ce rassemblement en annonçant le potentiel danger de ce rassemblement. Ils ont fait garder l’Hôtel de Ville de Belgrade par la gendarmerie et la police, ainsi que le campement non loin de là des « étudiants 2.0 » en présageant des violences qui n’auront pas lieu.

Loin d’être apeurés, les gens répondent à l’invitation des étudiants pour le 15 mars, en nombre si énorme que les journalistes en rient : malgré la pluie, les pavés de Belgrade devraient rester secs. L’estimation officielle du jour même s’élève à 100.000 personnes, le lendemain à 300.000, mais certains acteurs de la situation soutiennent qu’il y a eu jusqu’à un demi-million de manifestants à Belgrade ce jour-là. Et ceci malgré les tentatives de sabotage de toutes sortes y compris la non circulation des autocars inter-villes. 

Concernant la sécurité, étant donné la présence de la police et la probable tentative du gouvernement de causer des perturbations, les étudiants rappellent de nombreuses fois, publiquement, qu’il s’agit d’un rassemblement qui doit se passer en paix. Qu’il ne s’agit absolument pas d’un jour J d’aucune sorte, mais simplement d’un nouveau pas dans leur mouvement et qu’il y en aura d’autres. « Personne n’est fatigué ! » s’exclame dans son discours devant les gens une étudiante rappelant tous les efforts entrepris durant ces quatre mois, la marche à pied, le courage, l’organisation…

 

Entre l’Hôtel de ville et la masse des manifestants se tient une rangée d’étudiants chargés de l’organisation ce jour-là, et à leur côté des vétérans, anciens militaires, qui les soutenaient depuis Kragujevac où ils avaient rejoint la manifestation le 15 février. Ils les aident ce jour-là concernant la sécurité et l’organisation. À leurs côtés, les Bikers, qui soutiennent également depuis un bon moment les étudiants. Selon les estimations, ils sont environ 25.000 ce jour-là à Belgrade. Il est convenu que si l’on perçoit le moindre signe de violence ou de perturbation, on lance une fumée bleue comme signal. Ce qui arrive en effet vers la fin du rassemblement quand (pendant les 15 minutes de silence pour les victimes !) on essaie de semer le trouble. Ceci n’a pas de conséquences importantes, car les étudiants, aidés des vétérans, des Bikers et de la population, dégagent aussitôt l’espace devant l’Hôtel de Ville, avec une efficacité surprenante au regard de la masse des gens qui étaient présents. Et puis, dans les deux heures, le rassemblement prend fin de manière aussi pacifique que l’a été sa tenue.  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Il y a tant de monde à Belgrade, qu’il est impossible à tous de se rassembler devant l’Hôtel de Ville. Les gens doivent attendre entre une heure et deux heures pour traverser des ponts où, pour des raisons de sécurité, on les fait passer par groupes limités en nombre.

Un deuxième grand rassemblement se forme sur la place de Slavija. Et finalement, aussi pour des raisons de sécurité, les événements principaux, le chœur et les déclarations des étudiants ont lieu à Slavija et non pas devant l’Hôtel de Ville comme prévu à l’origine.

Le chœur chante l’Hymne national ; Gaudeamus Igitur, Vostani Serbije (Un chant qui dit : Serbie, lève-toi, tu t’es endormie depuis longtemps…) et des chansons traditionnelles, mais aussi plus contemporaines.

Dans leurs déclarations les étudiants expriment leur soutien aux professeurs et à tous les enseignants, et dénoncent le chantage et l’absence de salaire pour ceux qui sont en grève. Une étudiante raconte l’histoire de Platon dans la caverne et dit que nous y sommes encore et qu’il nous faut en sortir.

Un citoyen interrogé dans la rue dit qu’il est incroyable qu’encore aujourd’hui le gouvernement et les médias puissent vendre tant d’illusions aux gens : 

 

« La Russie, l’Amérique, la révolution orange, ça suffit. Je veux que mes enfants grandissent dans un pays où on valorise l’éducation, la connaissance. »

 

Une mère interviewée dans la rue dit qu’elle est là pour que ses enfants demain ne soient pas obligés d’être dans un parti, mais qu’ils puissent faire librement ce qu’ils souhaitent. Les étudiants s’expriment sur le fait qu’il s’agit de pouvoir penser librement, et que c’est justement ce qui ne convient pas aux gouvernements. 

 

Les ingénieurs ont marché avec leurs casques de travail et des pancartes disant « quand les bénévoles de la partie se prennent pour les ingénieurs » et aussi « quand c’est la galère, c’est la faute des experts, mais quand on décide, on ne demande pas aux experts ». Faisant, par la même occasion, allusion aux arrestations arbitraires ces derniers temps. 

Cette fois-ci, les agriculteurs sont présents dans le centre-ville avec leurs tracteurs. On filme un jeune homme avec des béquilles et même des personnes en fauteuils roulants dans la rue. 

La télévision nationale ne diffuse aucune information sur l’événement alors même que les médias étrangers transmettent en direct. Les gens dans la rue encouragent et félicitent les 

journalistes de la N1, la télévision qui consacre toute la journée son programme à l’événement et en fait même une reprise une fois le rassemblement terminé, vers 21h le soir. 

On entend, de manière informelle, que les étudiants s’interrogeraient sur la constitution de sortes de rassemblements populaires dans différentes villes, qui pourraient participer aux décisions politiques au niveau local.  

Discours d’une étudiante ce jour :

 

« L’histoire nous apprend que les grands changements sont souvent accompagnés de grandes erreurs. À travers l’histoire du peuple serbe, nous avons souvent changé le visage du système, mais pas le système lui-même. De ce fait nous devons être sages : changeons-nous l’essentiel du système, ou uniquement ceux qui sont censés le représenter ?  

Il nous est arrivé plusieurs fois dans notre élan de nous saisir de méthodes erronées, et saisis de désespoir de chercher à détruire ce qui nous opprime, sans penser à ce que, à partir de là, nous allons construire. Le pas vers la société que nous souhaitons construire est un fonctionnement élémentaire des institutions, ce qui est contenu dans la quintessence des demandes des étudiants. Le travail des institutions doit être dans l’intérêt général et objectif de tous les citoyens. 

De ce fait, la question se pose : Qu’est-ce qui actuellement empêche les institutions de répondre à ces demandes ? Est-ce que les institutions sont en mesure de travailler de manière indépendante et dans l’intérêt de tous les citoyens ? Nous serions en train de nous mentir à nous-mêmes si nous affirmions ne pas avoir les réponses à ces questions. Ils avaient quatre mois pour répondre à nos demandes, ce qu’ils n’ont pas fait.

Nos demandes sont basées sur les principes du droit et de la justice. Ces principes sont clés pour le fonctionnement de chaque société juste. Le fait est que ce système, non seulement ne veut pas, mais ne peut pas les remplir, ni résoudre ainsi les problèmes. Par là, ce système montre que cela provoquerait sa propre destruction.   

Ceci nous montre qu’il est dans une opposition essentielle à ces principes et que des vrais changements sont nécessaires afin de construire ensemble un système dans lequel ces principes seraient respectés. Pour créer des conditions dans lesquelles ce respect est une règle et non pas une exception, il est nécessaire que les sources de corruption se tarissent à jamais, ce que nous pouvons accomplir seulement ensemble, en faisant un effort pour aller vers un changement. 

Nous nous sommes organisés à partir de rien et nous avons déjà beaucoup accompli. Nous avons rassemblé le pays, les générations, et nous avons réveillé la solidarité et l’empathie, et montré que les changements sont possibles quand nous nous battons ensemble. Notre bataille n’est pas celle d’individus, mais de nous tous car elle concerne le bien de la société. 

C’est pourquoi nous vous invitons à y participer ensemble et de manière active et unie, durable, dans chaque endroit, sur chaque lieu de travail et chacun dans son entourage. Le fait est que le gouvernement n’est pas resté entièrement immune à la pression. Peut-être est-ce le moment où le gouvernement ressentira que le peuple ne se tait plus devant l’injustice. Si leur peur du respect de la loi est plus grande que leur souci pour la sécurité des gens, alors qu’ils sachent que le peuple n’oublie pas. Donc, plutôt que le chaos nous choisissons la sagesse, plutôt que les mouvements précipités nous choisissons le discernement, nous nous battons non pas pour détruire, mais pour construire. Que notre force soit non seulement dans l’opposition, mais dans la vision de ce qui vient après. La manière dont nous agissons aujourd’hui décide de notre vie à tous demain. » 

 

16 mars : Tentative de perturbation de la manifestation du 15 mars – utilisation d’un canon sonore ?

Pas encore tiré au clair le 15 mars, on comprend le lendemain que la tentative de perturber la manifestation est très probablement venue de l’utilisation d’un canon sonore, une arme utilisée pour contrôler les foules. Si elle n’est pas létale, celle-ci peut provoquer des conséquences graves pour la santé. Plus de 700 manifestants se sont retrouvés aux urgences avec de violents maux de tête, vomissements, problèmes d’audition. Les gens témoignent de la panique qu’ils ont éprouvée en se trouvant assommés par une force invisible et en entendant un bruit énorme, semblable à celui d’un avion ou de véhicules qui se rapprochent à grande vitesse.

La police, comme l’armée, qui selon les personnes compétentes seraient les seules à pouvoir posséder une telle arme, nient catégoriquement son utilisation le 15 mars. Le ministère de la santé fait de même. Le président également. Il aurait été question en 2022 en Serbie de se procurer une telle arme, mais on ne sait pas si les autorités la possèdent ou non. Son utilisation serait interdite dans le pays. Une investigation est en cours, sans pour le moment beaucoup d’espoir de connaître publiquement la vérité sur ce qui s’est passé.

Une autre perturbation a eu lieu un peu avant l’utilisation du canon sonore : les soi-disant « étudiants 2.0 » ont voulu brûler les tracteurs qui entouraient leur campement. Mais ceci a été empêché et calmé par les vétérans, probablement avec l’aide des bikers.

Quelqu’un de la gendarmerie a fini par contribuer à rendre public le fait que des canons sonores, non pas un mais sept ou huit, ont été accrochés le 15 mars aux véhicules de la gendarmerie. 

 

18 mars : Tribunaux en grève et échos en Macédoine

Les gens qui travaillent dans les tribunaux de tout le pays demandent une hausse des salaires.

En Macédoine du nord, après une tragédie où environ 50 jeunes gens sont morts dans une boite de nuit qui a pris feu, une grande manifestation a lieu et reprend les affiches avec les mains peintes en rouge et les mots d’ordre contre la corruption.

En Serbie, les étudiants se rassemblent devant l’ambassade de Macédoine pour un moment de commémoration et sont rejoints par l’ambassadeur.

Certains jeunes gens qui ont survécu à ce grave événement ont été pris en charge en Serbie en soins intensifs. Le président Vučić leur a rendu visite, accompagné de médias et du ministre de la santé, et ce contre toute règle – les visites sont interdites en soins intensifs. Les étudiants en médecine ont aussitôt réagi en condamnant cette visite. S’en suivra une manifestation.

 

Mars 2025 : Lettre ouverte des étudiants au peuple de Serbie

 

« Nous, étudiantes et étudiants, avons bloqué depuis presque quatre mois les universités dans toute la Serbie. On n’a toujours pas répondu à nos demandes, et plus nous faisons pression sur les institutions pour qu’elles fassent leur travail, plus nous supportons une pression à notre tour. Par la participation de plus en plus importante des citoyens et d’autres secteurs de la société, les manifestations ont grandi et sont devenues celles de tout le peuple. Notre société s’est unie comme jamais auparavant - d’abord dans le chagrin à cause de la tragédie - mais, aussitôt après, dans la bataille pour la justice. Néanmoins, la question qui s’impose à nous tous reste : quel est le pas suivant ?

Tout ce que nous, étudiants, avons accompli jusqu’à présent, est arrivé grâce à notre propre organisation, selon les principes d’une démocratie directe (sans intermédiaire), et des sessions plénières (plénum). Le plénum est un forum ouvert pour tous les membres d’un collectif, ou chacun, de manière égalitaire, peut proposer un ordre du jour, le discuter et prendre des décisions basées sur un vote. Contrairement au modèle dominant de la démocratie représentative, où tout le pouvoir et la responsabilité sont laissés aux représentants choisis, qui à notre place décident de nos destins, dans une démocratie directe, la question se pose à chacun et chacun est responsable de ce par quoi il est concerné. 

Chacun a le droit de participer à la gestion, direction, de son pays, directement ou à travers les représentants librement choisis. Ceci est garanti par l’article 21 de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Tandis que l’article 2 de la constitution de la République de Serbie nous dit qu’aucun organe d’État, organisation politique, groupe ou individu, ne peut s’approprier la souveraineté des citoyens. La loi sur une gestion locale autonome prévoit dans l’article 67 que les formes d’une participation directe des citoyens dans la réalisation d’une gestion locale autonome sont : l’initiative citoyenne, les assemblées citoyennes, et le référendum. La même loi dit dans l’article 69 : L’assemblée des citoyens discute et fait des propositions concernant les questions pour lesquelles sont responsables les unités de l’autonomie locale. L’assemblée des citoyens, par la majorité des voix des présents, adopte les demandes et les propositions et les adresse au parlement ou bien aux organes ou aux services de l’autonomie locale. 

Donc ce qui est plénum pour les étudiants, c’est pour le peuple une assemblée des citoyens. Néanmoins, à cause d’une centralisation prononcée et de la corruption du système, les autonomies locales sont négligées tendancieusement. La force du mouvement étudiant est dans une démocratie directe, qui, à la différence de la représentative, est moins susceptible d’être manipulée et corrompue. La démocratie représentative n’est manifestement pas en état de résoudre la crise sociopolitique de notre pays depuis des décennies, tandis que le modèle de la démocratie directe, basé sur notre expérience, a une chance. 

Les étudiants ne sont pas, ne veulent pas, ni ne peuvent, être porteurs de la volonté de tous. Les réponses à des questions étatiques les plus générales, et des questions sociales, qui sont soulevées actuellement, ne concernent pas exclusivement les étudiants, et de ce fait ne doivent pas tomber uniquement sur nos épaules. Toutes les citoyennes et tous les citoyens, qui selon notre constitution sont les porteurs irrévocables de la souveraineté, doivent participer à la discussion et la décision concernant la crise actuelle. De ce fait, nous vous invitons à vous tourner vers les autonomies locales et à vous organiser par vous-mêmes, selon le modèle d’une démocratie directe - par le biais des assemblées de citoyens qui sont prévues par la loi. 

Les questions et les décisions appartiennent à ceux qui sont concernés - donc nous tous. »  

 

19 mars : Le premier ministre démissionne après l’avoir annoncé depuis le 28 janvier

En cours, par ailleurs, une investigation concernant un éventuel détournement de fonds européens accordés pour la construction de la gare à Novi Sad. Un nouveau gouvernement doit être formé d’ici trente jours.

 

26 mars : Blocus du pont de Branko, manifestations à Novi Sad et documentaire « 12ème minute »

Blocage du pont par les étudiants, les enseignants, les employés du secteur IT… on lit : « Svi do mosta jer je dosta » (« Tout le monde sur le pont, car ça suffit »).

À Novi Sad a eu également lieu une manifestation des étudiants contre les arrestations de leurs collègues des différentes villes. 

Les étudiants de la faculté des arts du spectacle ont publié encore un documentaire, 12ème minute (Dvanaesti minut), sur la tentative de répression de la part du gouvernement, dans le film, la voix off de fin dit : 

 

« Nous devons montrer que nous n’avons absolument pas peur. Si après ça, ça s’arrête, si tout ceci s’arrête à cause de ça, alors pourquoi on a fait tout ça ? » 

 

Mars : Ce qu’il se passe dans les médias 

La question de l’exploitation du lithium, notamment le projet minier Jadar soutenu par l’Union Européenne, est très présent dans les médias. Cela conduit les gens à s’interroger sur le positionnement de cette Union Européenne, ayant signée les contrats sur le lithium avec le gouvernement Serbe.

La question de la répression et de la peur est également très présente dans les médias durant le mois de mars, y compris sur la première chaine, la répression étant de plus en plus importante des manifestations, et certains étudiants ayant été tabassés et arrêtés. 

Sur la N1, un professeur de la faculté de Philosophie, Oliver Tošković, raconte comment un ami et collègue de son oncle est mort dans la mine de Kostolac, dans les années 1990. Les ouvriers ont d’abord essayé de l’aider, sans succès ; tout ce que les agents de sécurité ont fait ensuite était de venir mettre le casque de sécurité sur le corps de l’homme déjà mort car selon le règlement tout le monde doit porter un casque de sécurité (au cas où l’inspection vienne). De là, il dit la situation en Serbie aujourd’hui est celle-ci : un corps mort auquel on essaye de mettre un casque sur la tête. Il ajoute, donnant l’exemple du montage des étudiants 2.0. : 

 

« Le gouvernement se comporte vis-à-vis du peuple comme vis-à-vis d’un ennemi. Ils créent une réalité parallèle. »

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« LA SERBIE SE LÈVE POUR QUE LE RÉGIME TOMBE »

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« BELGRADE EST DE NOUVEAU LE MONDE »

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Mars et avril : Des manifestations plus ou moins grandes et toute sorte d’initiatives prolifèrent dans toutes les villes du pays, malgré un moment de peur et d’incertitude après le 15 mars

Une grande manifestation a lieu le 3 avril à Zrenjanin. Les étudiants, lycéens et citoyens ont crée un « mur de la honte » pour ceux qui, de leur ville, ont fait partie du groupe étudiants 2.0, ainsi que un autre « mur » sur lequel ont été exposées des photos de toutes les initiatives et événements du mouvement étudiant ou en lien avec lui. Zrenjanin est une ville où depuis longtemps maintenant l’eau courante n’est plus potable, problème qui non seulement n’a pas encore été résolu mais qui n’a même pas été publiquement reconnu comme un problème. Les manifestants appuient donc également sur ce point. 

Le 5 avril, à Belgrade, les étudiants ont organisé une vente humanitaire pour récolter de l’argent pour un établissement qui héberge et accompagne les enfants et les jeunes qui ont vécu des violences familiales. Un très grand nombre de gens répond à l’appel et vient acheter des badges, des sifflets, des sacs, des cartes postales…  

 

Du 3 au 18 avril : Tour de Strasbourg, les étudiants partent à vélo jusqu’à Strasbourg où ils prévoient d’arriver le 15 avril

Les étudiants ont créé un site Internet où on peut suivre leur trajet en Europe. Ils s’apprêtent à faire 1300km en 12 jours. Ils sont 80 dont quelques jeunes femmes. Les étudiants écrivent sur leur site :

 

« Nous, étudiants de Serbie, n’avons pas entrepris ce voyage par caprice. Nous sommes partis car nous n’avons plus où aller. 

Nos rues, jadis lieu de l’espoir et de rencontre, sont maintenant des scènes de la peur et de l’injustice. Les amis et les collègues sont arrêtés, parce qu’ils ont dit la vérité, et les institutions sont devenues des instruments de la répression. Ceci n’est pas seulement un tour à vélo. Ceci est le chemin de l’espoir, de la résistance et la voix de tous ceux qui ont été forcés à se taire. 

Tout ceci a commencé le 1er novembre 2024 quand l’auvent de la gare a Novi Sad est tombé et a emporté 16 vies. Cette gare construite en 1964 a été rénové en 2024 et la partie qui s’est effondré n’a pas légalement fait partie des travaux de reconstruction. Cette tragédie a montré la vérité sur le système où les vies sont devenues des nombres, dans la chaîne de la corruption et de la négligence.

Les citoyens étaient en deuil pendant que les institutions offraient les promesses vides et une fausse empathie. 

À la place de la responsabilité, le gouvernement nous donne la violence. Plutôt que la justice – le bâton, les piétinements, et les gaz lacrymogène. Plutôt que le dialogue, la prison et la censure. Les manifestations s’élargissaient et la répression devenait de plus en plus brutale. 

C’est pourquoi nous allons à Strasbourg. Non pas parce que nous nous attendons à ce que quelqu’un d’autre puisse résoudre nos problèmes, mais pour que le monde entende la voix de la Serbie. Pour que les institutions Européennes fassent pression sur le gouvernement se mettent du côté des droits de tous ceux qui sont obligés à se taire. 

Notre mission est claire :

- Que le monde sache la vérité sur la Serbie, 

- Que les institutions réagissent et mettent la pression sur le gouvernement,

- Élever la voix de tous ceux qui sont forcés à se taire.

Nous ne demandons pas beaucoup, seulement la vie sans peur, sans censure et sans la violence. 

Nous ne nous arrêterons pas tant qu’on n’a pas répondu aux demandes des étudiants. » 

 

L’idée du voyage jusqu’à Strasbourg semble être une idée venue des étudiants de l’Université de Novi Sad. Ils écrivent aux autres Universités début avril :

 

« Respectueusement, à tous nos collègues,

Nous vous informons que les étudiants dans le blocus de l’Université de Novi Sad ont décidé de voyager à Strasbourg, afin de remettre une lettre au Conseil de l’Europe et à l’Union européenne. C’est-à-dire avant tout aux responsables concernant les droits de l’homme. Le départ pour ce voyage très important est prévu pour le 3 avril. Afin de pouvoir remettre la lettre 13 jours plus tard. Nous souhaiterions présenter et signer cet exploit non seulement comme étudiants du Blocus de Novi Sad, mais comme action commune. Nous avons pour ceci besoin de votre accord. Nous vous envoyons de ce fait en pièce jointe la lettre qui partira ce jeudi avec les cyclistes pour Strasbourg. Ainsi que le document où cette action est décrite et expliquée. Nous vous prions d’en informer vos plénums et de nous faire un retour. 

Cordialement,

Les étudiants du blocus de Novi Sad. »

La lettre adressée au Conseil de l’Europe et de l’Union Européenne : 

 

« objet : Information sur les manifestations et la violation prolongée des droits de l’homme en Serbie

 

Madame, Monsieur

Nous vous écrivons pour attirer votre attention sur les violations alarmantes des droits de l’homme qui ont lieu en Serbie et pour vous informer sur les manifestations en cours qui durent depuis les cinq derniers mois. Ces manifestations menées par les étudiants à travers toute la Serbie, et qu’ils organisent avec les citoyens et leur grand soutient, montrent un très grand mécontentement devant la dégradation des principes démocratiques, la répression politique, et la violation des libertés basiques dans le pays ainsi que l’abandon du règne du droit. Durant cette période, comme c’est connu publiquement dans le monde, de nombreux rapports ont documenté un recours excessif à la violence de la part des organes de l’application de la loi vis-à-vis des manifestants pacifiques. Les arrestations arbitraires et les tactiques d’intimidation des activistes, étudiants, journalistes, les personnalités de l’opposition et des citoyens. Tout ceci à cause des manifestations qui représentent l’expression du mécontentement des citoyens devant les méthodes autoritaires des structures du pouvoir, l’étouffement de la pluralité des pensées, ainsi qu’une grave violation vis-à-vis de la liberté d’expression et du rassemblement public. L’environnement médiatique continue à s’aggraver tandis que les médias indépendants sont de plus en plus confrontés à la pression et à la censure, tandis que les médias publics sont dans un rapport de passivité vis-à-vis des manifestations qu’ils ne mentionnent quasiment pas pendant les cinq mois de leur durée. Les médias indépendants font face à une pression constante, chantage économique, pression politique, et même des menaces directes aux journalistes qui informent sur les manifestations et la corruption dans les institutions étatiques. Les éditeurs et les rapporteurs des médias indépendants sont les cibles d’une campagne de discréditation de la part des journaux pro-gouvernementaux et des fonctionnaires. 

Les détenteurs du pouvoir dans La République de Serbie ont recours à des mesures hors la loi pour réprimer les manifestations, une instrumentalisation des médias pro-gouvernementaux et le dénigrement et la critique de ceux qui informent de manière objective. Ils propagent la peur et insultent constamment toute la population qui exprime son mécontentement par des manifestations pacifiques. 

Pour le rappeler, à Novi Sad, le 1er Novembre 2024 à 11h52 est tombé l’auvent (deux fois reconstruit) de la gare. Lors de l’effondrement de l’auvent 14 personnes sont mortes sur le champ et trois personnes ont été grièvement blessées. Une de ces trois personnes est décédée le 17 novembre 2024, tandis qu’une deuxième (un jeune homme de 19 ans) a perdu la bataille pour sa vie le 21 mars 2025. Ainsi le nombre de victimes est devenu 16. À cause d’une réaction inadéquate des institutions et des fausses informations données par le président de la république et des détenteurs du pouvoir public, dans les médias nationaux sur le fait que l’auvent de la gare n’aurait pas été objet de reconstruction, les citoyens sont sorties dans les rues le 5 novembre 2024 et ont ainsi exprimé très fort leur mécontentement. 

Le 15 novembre 2024, à 11h52, les citoyens de toutes les villes de la Serbie ont marqué 14 minutes de silence en l’honneur des victimes dans des rassemblements pacifiques appelant : « Serbie, arrête-toi » ou « arrête-toi un instant ». L’idée était de rendre hommage aux victimes chaque vendredi (le jour de l’effondrement de l’auvent) à la même heure. Néanmoins le prochain était de 15 minutes car une personne est décédée dans les deux jours qui ont suivi. 

Déjà dans les premiers jours qui ont suivi l’effondrement de l’auvent, il devenait clair que cet événement tragique n’est pas un pur accident mais la conséquence d’une corruption profondément enracinée depuis des années et d’une pression exercée sur les professionnels afin d’accomplir des buts politiques et donc l’effondrement et l’absentement de toute institution. 

Les professeurs et les étudiants de la faculté des arts du spectacle à Belgrade le 22 novembre 2024 se sont rassemblés non loin de l’établissement pour rendre hommage aux victimes. Ce jour, les citoyens rassemblés ont été attaqués physiquement. Parmi eux, la plupart étaient les étudiants et les professeurs de cet établissement Universitaire. Les réactions inadéquates des institutions responsables et des organes du pouvoir public vis-à-vis de cette attaque sur les étudiants et les professeurs font que les étudiants de la faculté des arts du spectacle ont organisé le premier plénum. Dans ce plénum, le 25 novembre 2024, a été voté le blocus de cet établissement Universitaire. Néanmoins les attaques physiques sur les étudiants et les citoyens n’ont pas cessé mains se sont intensifiées. Chaque jour, nous étions témoins de nombreuses attaques vis-à-vis des étudiants et citoyens qui se rassemblaient pour rendre hommage aux victimes de l’effondrement de l’auvent. Il n’y avait de nouveau pas de réaction des institutions, et les responsables pour ces attaques n’ont pas été examinés ni punis. Le président de la république a constaté dans les médias une violence relative et les services publics (Radio et télévision de Serbie et de Vojvodina) ont reçu de fortes critiques pour le parti pris dans les informations. 

À partir de toutes les circonstances sociales et de l’incident qui a eu lieu, durant cette période et dans tout le pays, les étudiants des autres universités de Serbie ont, en signe de solidarité avec les collègues de la faculté des arts du spectacle, bloqué leurs Universités. Actuellement environ 40 établissements Universitaires sont bloqués jusqu’à ce qu’on réponde aux demandes des étudiants. Les demandes des étudiants sont en pièce jointe de cette lettre. Exprimant également une forte solidarité avec les étudiants, un mécontentement général de l’état du pays, et le mécontentement du travail des institutions, surtout vis-à-vis des responsables de l’effondrement de l’auvent de la gare, a commencé une grève des travailleurs de l’enseignement dans toute la Serbie. Dans les écoles primaires, les lycées et les crèches. Ont arrêté le travail également les agriculteurs, et les organisations appartenant à différents métiers : dans la culture, les acteurs, les avocats et autres. 

Malgré toutes les pressions, menaces et chantages, le peuple de Serbie continue à se rassembler pacifiquement dans tout le pays, exprimant le mécontentement vis-à-vis de la dégradation des institutions, la pression politique et le contrôle du travail des institutions indépendantes, ainsi que l’absence de toute responsabilité pour les actions de corruption et l’effondrement de l’auvent de la gare. Depuis l’effondrement de l’auvent le 1er novembre 2024  jusqu’à aujourd’hui, ont été organisés des dizaines de manifestations dans toute la Serbie. Les manifestations les plus nombreuses ont été :

  1. Manifestation sur la place de Slavija à Belgrade le 22 décembre 2024

  2. Blocus de Autokomanda à Belgrade le 27 janvier 2025 qui a duré 24 heures

  3. Blocus des trois points de Novi Sad le 1er février 2025 

  4. Manifestation à Kragujevac appelée « Rencontrons nous le jour de Sretenje » le 15 février 2025 qui a duré 15 heures

  5. Manifestation à Novi Pazar, appelée « Venez vite à Pazar » le 1er mars 2025

  6. Manifestation à Niš appelée « L’édit étudiant » le 1er mars 2025

  7. Manifestation à Belgrade appelée « Le 15 pour les 15 » le 15 mars 2025. Cette manifestation est considérée comme la plus grande qui a eu lieu en Serbie. 

Le Belgrade officiel ignore obstinément les demandes des citoyens pour une transparence dans le travail des institutions. Tandis que l’espace public est contaminé par la propagande politique et les manipulations qui ont pour but de discréditer tout un chacun qui critique le régime. Comme membre du conseil d’Europe, la Serbie est obligée de respecter la convention sur les droits de l’homme et les principes basiques de la démocratie mais également tous les autres instruments exigés par le conseil d’Europe incluant les comités des ministres. Néanmoins les événements actuels montrent que l’État s’éloigne de ces valeurs, violant ses obligations comme membre de cette organisation. En lien avec ceci, nous invitons le conseil européen à :

  1. Examiner en urgence la situation en Serbie, dans le débat du parlement Européen et des autres organismes compétents. 

  2. Engager une mission indépendante pour l’évaluation de l’état des droits de l’homme et de la démocratie en Serbie. 

  3. Exiger du gouvernement Serbe de cesser la violation des droits de l’homme, la répression vis-à-vis des citoyens et la limitation de la liberté des médias. 

  4. Examiner les mécanismes qui permettraient le respect des droits de l’homme en Serbie.

Les citoyens de Serbie, malgré la répression croissante, montrent un grand attachement aux valeurs démocratiques et aux droits de l’homme. Ils attendent de la communauté internationale et particulièrement du conseil Européen de protéger les principes qu’il représente lui-même. 

Avec l’espoir que vous reconnaitrez la gravité de la situation et ferez les pas nécessaires, nous vous remercions pour votre temps et attention, et sommes à votre disposition pour des renseignements complémentaires. 

 

Respectueusement

Les étudiants et les citoyens de Serbie »

Document expliquant les raisons et ambitions du voyage à Strasbourg : 

 

« Novi Sad - Strasbourg

 

La raison de cette action : 

La raison de cette action est l’absence de quasiment toutes institutions compétentes qui devraient agir au regard de tous les événements désagréables survenues sur le territoire de la République de Serbie depuis le 1er novembre 2024, à compter la journée d’aujourd’hui, le 23 mars 2025.

 

Les buts de cette action sont les suivants :

- Information des institutions internationales qui ont la possibilité d’agir directement ou indirectement sur les institutions de notre pays afin de créer une pression de l’extérieur sur les compétents. 

- Attirer l’attention des médias au niveau mondial qui peut ensuite avoir pour résultat la pression non seulement sur les institutions internationales que nous prévoyons d’interpeller (elles seront énumérées plus loin) mais également les institutions dans le pays dont nous attendons les actions. 

- Voyage à travers des grandes villes en Europe, où nous pourrions rendre visite aux personnes de notre pays qui vivent à l’étranger et montrer le soutien que nous avons de leur part. 

- Créer des connexions internationales avec les étudiants étrangers dans les villes universitaires sur notre chemin.  

 

Description de l’action : L’action comporte un voyage à vélo jusqu’à Strasbourg afin de remettre des lettres / rapports, (l’exemple du document sera en pièce jointe) aux institutions qui pourraient s’intéresser aux évènements dans notre pays et pourraient avoir une certaine influence. Cette action vient de l’amertume causée par la violation d’un grand nombre de droits de l’homme comme des droits qui sont garanties par la constitution de la République de Serbie, sans réaction de la part des institutions compétentes. 

Etant donné l’absence de réaction, nous avons décidé de nous adresser aux institutions internationales qui ont la possibilité de réagir et qui ont une certaine influence sur le territoire de la République de Serbie. 

Les institutions auxquelles nous nous adresserions sont :

  1. Le conseil de l’Europe 

1.1. Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe

    1. Le Commissariat pour les droits de l’homme

    2. Instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme

    3. Le conseil des ministres 

  1. L’Union Européenne 

    2.1. Le parlement Européen

    2.2. Commission Européenne

    2.3.  Agence des droits fondamentaux de l’UE

 

Pourquoi nous adressons-nous au conseil de l’Europe et à l’Union Européenne ?

Le conseil de l’Europe est une organisation internationale ayant pour but de soutenir les droits de l’homme, la démocratie et le règne du droit en Europe. Il est composé de 46 États membres et la République de Serbie en fait partie. 

L’Union Européenne est une alliance politique et économique de 27 États membres qui se trouvent avant tout en Europe. Etant donnée que la Serbie est « en voie d’intégration », ce qui s’y passe concerne de facto l’Union Européenne. »   

 

Le pianiste italien Davide Martello, après avoir joué dans plusieurs manifestations en Serbie dont celle de Niš, a reçu une obligation de quitter le territoire Serbe. Il a alors décidé d’accompagner les cyclistes sur leur route.

La N1, première chaine du pays, informe également le 8 avril 2025, qu’une femme croate vivant depuis 12 ans à Belgrade, où elle a fini ses études de médecine et fondé sa famille (mariée à un Serbe avec qui elle a un enfant en bas âge), a reçu une obligation de quitter le pays et l’interdiction de revenir pendant un an, uniquement parce qu’elle a soutenu les étudiants et ceci en participant à plusieurs grandes manifestations, rien de plus.

À partir du 14 avril 2025 : Blocus de la télévision nationale (RTS) 

Le blocus a d’abord lieu à Belgrade, par les étudiants. Un blocus de la radio et télévision de Vojvodina est également en cours. Les étudiants ont bloqué le bâtiment avec la demande d’une inspection spécifique du travail de cet établissement. Au fur et à mesure, les ont rejoints les vétérans, les bikers, mais aussi des citoyens. Les étudiants ont passé la fête de Pâques devant le bâtiment de la RTS. Dans le week-end de Pâques les alors ont rejoints les étudiants de Novi Pazar. 

C’est à ce moment-là, devant la RTS, que s’est adressé à tout le monde un vétéran Goran Samardzic. Les vidéos de son discours, que voici, font le tour des réseaux sociaux :

 

« Que Dieu vous aide frères et sœurs ! 

La foule répond : Que Dieu t’aide !

Je souhaite que nous saluions nos chers invités de Novi Pazar par Assalamu alaykum !

La foule : Assalamu alaykum ! suivi de longues applaudissement

Je m’appelle Goran Samardzic. Avec mes compagnons d’armes, les vétérans de guerre, nous nous sommes levés pour protéger nos enfants, nos étudiants. Nous avons tous juré devant Dieu que nous donnerons nos vies s’il le faut pour que rien n’arrive à ces enfants. 

Applaudissements

Bien sûr, avec nos frères et sœurs, les bikers.

Applaudissements

Outre le fait d’être vétéran, je suis également invalide de guerre. J’ai été blessé en mai 92 à Sarajevo. Je n’avais pas encore 21 ans, ce qui est l’âge de la majorité de nos enfants là. Ma génération est partie ou s’est trouvée en guerre en Bosnie. Certains sont partis pour combattre, entre guillemets, « les Turcs qui voulait créer un état islamique en Europe et nous pour protéger la terre sainte de la Serbie, et protéger le peuple de la Serbie ». En avril, cette année 1992, a pris feu la marmite sanglante de la Bosnie. Tous les côtés se sont précipités à qui la fera bruler plus fort. Notre cuisine pour la propagation du mensonge et de la haine se trouve dans ce bâtiment au dessus de nous.

La foule crie fort

Oui dans cette même RTS qui aujourd’hui encore propage le mensonge et la haine. 

La foule crie encore

Ma génération a cru ces mensonges, et a cru que nous faisions la bonne chose. Que nous avions raison et que les autres sont le Mal. Tandis que les autres pensaient pareil pour eux-mêmes. C’est alors qu’a commencé à tourner la roue du Mal qui tarde à s’arrêter et tourne chez beaucoup de gens encore aujourd’hui. Nous avons cru ces mensonges, mais cette génération d’aujourd’hui ne les a pas crues. Elle s’est levée pour que ça s’arrête.

Applaudissements

Ils sont ceux qui propagent l’amour et éclairent le futur. Ce futur est ce que nous tous souhaitons, et notre devoir, de nos générations ratées, est de nous lever et de les suivre. 

Applaudissements

Je souhaite dire pour les parents de ces enfants de Novi Pazar, de ne pas s’inquiéter et qu’il n’y a plus de : nos enfants et vos enfants. Ce sont tous nos enfants !

Longues applaudissements qui ne le laissent pas continuer

Ces enfants, ces derniers mois, depuis qu’ils se sont réveillés, ont soulevé beaucoup d’entre nous, et y compris nous, les vétérans de guerre. Après de longues années, nous éprouvons l’honneur, l’admiration, la gratitude, et nous portons fièrement le nom des vétérans. Je souhaiterais exprimer…

Il est interrompu par les applaudissements

Je souhaiterais exprimer l’admiration et la gratitude envers les vrais héros d’aujourd’hui, nos étudiants, nos enfants, merci les étudiants !

Longs applaudissements. Puis la foule acclame : « Les étudiants ! Les étudiants ! … »

 

15 avril : Zoran Djaic emprisonné et arrivée des cyclistes à Strasbourg

L’ingénieur, Zoran Djaic, l’un des premiers à avoir rendu public les malversations quant aux travaux sur la gare de Novi Sad, est emprisonné. Il est accusé d’avoir invité sur les réseaux sociaux à l’introduction d’une peine de mort pour le président Vučić.

Les cyclistes sont accueillis majoritairement par la diaspora serbe de France, Allemagne, Suisse. Certains jeunes gens de la diaspora les ont rejoint à vélo en cours de route depuis les villes où ils habitent et se sont dirigés vers Strasbourg avec eux. 

 

16 Avril : Lettre ouverte à Macron

Réception dans le parlement Européen des étudiants cyclistes par la députée slovène Irina Joveva et un député croate. Réception également des étudiants au Centre Européen de la jeunesse. 

Une lettre à Emmanuel Macron est écrite dans le contexte où, en même temps que les étudiants se dirigeaient à vélo à Strasbourg, le président français a reçu le président de Serbie à Paris. Cette lettre est lue en anglais devant le conseil de l’Europe où étaient rassemblés majoritairement les étudiants Serbes, arrivés à vélo, et d’autres, certains lycéens, des Serbes de la diaspora vivant en France, Allemagne, Suisse… mais aussi des Serbes venus de la Serbie :

 

« Respectueusement au Président Macron,

Nous nous adressons à vous en tant qu’étudiants de Serbie, jeunes gens qui ont décidé, en absence de justice et de dialogue dans leur pays, de se diriger à vélo vers les sièges des institutions européennes et internationales. Notre voyage de plus de 1400 km que nous avons appelé « Tour de Strasbourg », est un symbole et témoignage de désespoir mais aussi d’un espoir inébranlable. 

Notre mission est simple mais aussi importante de manière brulante : pointer devant la communauté internationale la dégradation de plus en plus profonde des valeurs démocratiques en Serbie. Nous vivons dans un pays où les institutions ne protègent plus les citoyens, mais plutôt les intérêts de l’étroit cercle des détenteurs du pouvoir. Les médias sont sous pression, les élections sont compromises, et la pensée critique est marginalisée et ciblée.

Les circonstances de ce soulèvement sont la tragédie de Novi Sad, effondrement de l’auvent de la gare qui a tué 16 personnes, y compris des enfants. Mais la cause est beaucoup plus profonde. Une irresponsabilité systématisée, la corruption, et la dévastation des institutions qui existaient jadis pour les citoyens. À la place d’une réponse et de prise de responsabilité, les citoyens ont eu le silence et une injustice de plus. C’est pourquoi nous pédalons et portons le message. La Serbie a besoin d’un soutien de l’Europe, mais non pas celui qui prend la forme de rencontres protocolaires et de sourires diplomatiques. Nous ne demandons pas des sanctions. Nous demandons un regard vrai et responsable. Car les rencontres avec les leaders qui ne prennent pas la responsabilité vis-à-vis de leurs citoyens, sans regard critique, peuvent être comprises comme légitimant l’autoritarisme.

Respecté président, vous qui aviez souvent mis en avant l’importance des valeurs européennes, de la liberté et des droits de l’homme, vous avez aujourd’hui l’occasion de montrer que ces valeurs sont universelles. Votre soutien dans la bataille pour la vérité, la justice et la liberté en Serbie, aurait beaucoup d’importance, non seulement pour nous, mais aussi pour toute la génération de jeunes gens qui souhaitent rester dans leur pays et le construire sur les bases de la démocratie et de la dignité. 

Nous ne nous conduisons pas vers l’Europe pour fuir notre pays. Nous nous y conduisons pour nous rendre notre pays.  

Avec un profond respect,

Les étudiants de Serbie » 

 

18 avril : Retour des cyclistes à Novi Sad avec un très bel accueil

Les cyclistes ont été aussi accueillis dans leurs villes d’origine au retour de chacun. 

 

Avril : les étudiants discutent dans les plénums l’idée de la formation d’un gouvernement des experts.

Il semble que la proposition de demander la formation d’un gouvernement d’experts était une idée des étudiants de l’université de Niš, inquiets du fait que les problèmes s’aggravent qu’il n’y a toujours aucun réponse positive aux demandes étudiants.

Il semble par ailleurs que les étudiants de la faculté de philosophie de Belgrade sont contre la proposition. Ils considèrent qu’elle n’a pas encore été suffisamment discutée. Ils pensent que se consacrer à la formation d’un gouvernement d’experts a pour but d’étouffer le mouvement étudiant et d’éviter les changements de fond que les étudiants demandent. Ils déclarent ceci pour la N1 :

 

« Le concept des experts dans ce contexte est de la poudre dans les yeux. Il n’y a pas d’acte ou de document qui déclarerait quelqu’un « un expert ». C’est une catégorie arbitraire qui sert à laver la personne de tout intérêt idéologique. Cela ne fonctionne pas. Tout a d’une certaine manière une couleur idéologique. Nous sommes catégoriquement contre l’idée que les étudiants proposent la formation d’un gouvernement d’experts. »

 

1er mai : Grandes manifestations à Novi Sad et à Belgrade

Plusieurs milliers de personnes ont été présentes dans les deux villes dont les familles, les retraités et les jeunes. Cette fois, différents syndicats ont été également présents, probablement à l’occasion de la fête du travail. Une économiste de 46 ans dit pour la N1 : 

 

« Nous sommes ici pour les meilleurs conditions de travail et de vie pour les travailleurs. J’ai suivi et soutenu l’activité du mouvement étudiant depuis le début. C’est important que les étudiants et les travailleurs se battent ensemble pour un futur meilleur. »

 

Les retraités avait une pancarte : « Assez de promesses, les retraités ont faim. » 

Un membre d’un syndicat a dit que pendant les 20 années de son activité il n’avait jamais vu cinq différents syndicats ensemble aux manifestations, ce qui était le cas aujourd’hui.

Les étudiants ont annoncé qu’ils exigeront un changement de la loi sur le travail. Et, entre autres, sur le droit concernant la grève. Ceci en lien avec le fait que nombreux enseignants qui soutiennent le mouvement sont restés des mois sans être payés.  

Ce jour, à été inauguré un monument devant la gare à Novi Sad, où il est dit « Novi Sad se souvient, 1er novembre 2024, 11h52. » Une femme qui a perdu son fils de 27 ans dans cet événement tragique a pris publiquement la parole pour remercier les étudiants. Elle dit : 

 

« J’ai réalisé que les leaders de notre pays ne se soucient ni pour les enfants, ni pour les gens, mais uniquement pour l’argent. »

 

La N1 écrit que depuis novembre, la Serbie vit au régime d’une manifestation par jour.

 

2 mai : Boycott des partiels

Les lycéens de trois lycées de Belgrade ont annoncé qu’ils allaient boycotter les partiels si leurs professeurs décident de reprendre le travail.  

 

Du 25 avril au 15 mai : Course jusqu’à Bruxelles 

De même que les cyclistes se sont rendus à Strasbourg, une vingtaine d’étudiants organise une course de Novi Sad jusqu’à Bruxelles. Les étudiants publient en ligne le texte suivant : 

 

« Pourquoi courons-nous jusqu’à Bruxelles ?

Notre protestation a commencé dans le silence.

Chaque vendredi, à 11h52 précises, nous restions immobiles pendant quinze minutes — en mémoire des 15 vies perdues lors de la tragédie à la gare de Novi Sad.
Aujourd’hui, malheureusement, nous restons pour 16 minutes.

De ce silence est né un mouvement.

Les étudiants de la Faculté des Arts Dramatiques de Belgrade ont d’abord bloqué leur faculté. Puis les blocages se sont étendus à toutes les universités de Serbie.

Nos revendications sont claires :

  • Responsabilité pour la tragédie

  • Transparence dans le fonctionnement des institutions

  • Fin de la corruption systémique

Malgré les tentatives de discrédit et de répression, notre mouvement a grandi, rassemblant ceux qui croient en la justice et en la vérité. Des lycéens, des enseignants, des agriculteurs, des avocats, des médecins, des ingénieurs, et d’autres secteurs nous ont rejoints.

Des citoyens de toute la Serbie.

Au cours des cinq derniers mois, les étudiants ont organisé les plus grandes manifestations de l’histoire de notre pays. Les grandes villes se sont levées, mais aussi de nombreuses petites communes de Serbie.

Nous avons couru vers beaucoup d’entre elles. Notre course a éveillé l’espoir dans les endroits que nous avons traversés, et chaque rencontre avec ceux qui croient en la liberté nous a donné de la force.


Aujourd’hui, nous courons vers Bruxelles.

En mai, le Parlement européen examinera la situation en Serbie. Nous y courons. Nous portons des lettres aux institutions européennes.

Notre intention est pure.

Nous ne demandons pas la clémence - nous exigeons des responsabilités.
Nous ne réclamons pas d’attention - nous apportons la vérité.

Nous parcourons des milliers de kilomètres pour raconter notre histoire.

Nous courons pour montrer la force de la lutte pour la justice.

Nous courons parce que nous croyons en l’unité.

Nous courons pour que l’Europe entende ce que de nombreux médias taisent.
Nous portons la voix de millions de citoyens.

Nous courons pour les 16 vies perdues à cause de la corruption.

Et nous ne nous arrêterons pas tant que la vérité n’aura pas été entendue.

Nous courons parce que l’avenir est entre nos mains.

 

TrkaCi u Blokadi / Coureurs en Blocus »

 

15 mai : Début du blocus du bâtiment de tribunal à Novi Sad

Les étudiants et d’autres personnes demandent que soient libérés les activistes emprisonnés.

 

Mai : Les rassemblements de la diaspora continuent et approche des élections

À Paris il y en a eu 17 pour le moment, le dernier au sujet des arrestations des activistes en Serbie.

Les étudiants préparent leur propre liste sur laquelle il n’y aura pas d’étudiants mais plutôt des personnes à qui ils estiment pouvoir faire confiance. 

 

21 mai : À Lapovo

Les habitants de Lapovo, non loin de Kragujevac, afin de soutenir le mouvement étudiant, ont décidé dans leur assemblée de participer à un rassemblement organisé par le président. Les gens étant payés pour y participer, ils ont donné l’argent obtenu aux étudiants de  l’Université de droit à Kragujevac. 

Illustrations par Odinise

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Accueil des étudiants à Budapest le 5 avril 2025

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